Martha Grünenwaldt
User les yeux
Martha a commencé à dessiner à soixante-et-onze ans. Et elle a vraiment récupéré les temps de sa vie où elle n'a pas pu explorer cette puissance qui était en elle depuis toujours. Elle a produit des centaines de feuillets. Dans sa maison familiale à Hamme Mille (Brabant Wallon - Belgique), il y avait bien peu de choses. Une image forte me revient - en 1940 l'école avait subi des bombardements allemands et des classes béantes offraient leur matériel éparpillé. Elle avait osé ramasser les petits crayons de couleur qui traînaient dans les gravats. C'était du vol avait dit sa soeur - alors elle les avait rapportés à personne car tout le village s'était enfui... Etait-ce déjà cette chose qui n'a pas de nom qui l'envahit dès six heures du matin lorsqu'elle se lève la première et qu'elle s'installe près de la grande fenêtre ensoleillée de mai, pour peindre et dessiner. Elle a vécu dans la précarité durant la plus grande partie de sa vie. Et aujourd'hui moins que jamais les conditions de vie, les problèmes de rhumatismes ou autres ne font l'objet de préoccupation de sa part. Elle voyage, penchée sur la feuille, elle colore ses horizons, elle fabrique un monde nouveau obstinément jusqu'au bout de ses limites..."Je pense que maintenant, je vais reposer un peu mes yeux, dit-elle la semaine dernière, j'ai quand même quatre-vingt-huit ans", hein....(texte paru en 1988)
Josine, sa fille